Editions Traditionnelles |
Il était « monté à Paris » quelques années auparavant, et tenait un étal de bouquiniste sur les bords de Seine, côté Hotel Dieu. Il avait fait la connaissance d’une belle jeune fille dont le papa, écrivain, membre de la Société des auteurs s’appelait Jules Lermina. C’est ce dernier qui, en lui accordant sa fille, le poussa à s’installer dans une vraie librairie, ce qui devait sans doute faire plus sérieux que bouquiniste ! Mais, c’est aussi sous l’influence de son beau-père, féru d’occultisme et d’ésotérisme, que Henri prit sans le savoir une option pour tout le siècle qui allait suivre en appelant sa boutique « Librairie Générale des Sciences Occultes ».
C’est
donc à la tête de leur librairie, qui s’appelle maintenant « Chacornac Frères » que Paul et Louis décident de réveiller la revue
« Le Voile d’Isis », et là on peut se reporter à la fenêtre
consacrée
Les deux frères ont fondé une famille, mais restent soudés, ils sont complémentaires, et c’est leur force : tandis que Louis, le plus jeune est le comptable, le gestionnaire, Paul s’est totalement investi dans la production des livres, il pratiquera l’astrologie en restant modeste auprès des plus grands qui passent quai Saint Michel, et surtout il se mettra à écrire, se faisant en quelque sorte historiographe et sera l’auteur de 4 ouvrages biographiques faisant aujourd’hui référence dans notre catalogue. Travailleur minutieux et infatigable, il se tue les yeux penché sur les copies, livres et manuscrits , dans son bureau au - dessus de la boutique. Boutique qui fait profil bas durant l’occupation, de 41à 45, ce qui se comprend aisément lorsque l’on connaît les sujets des livres qui garnissent les rayonnages. D‘ailleurs, pour la petite histoire, il est intéressant de savoir que la partie de boutique donnant sur l’arrière, rue de la Huchette, a vu se fermer ses volets en 41 et nous ne les avons rouverts qu’en 1994. Au début des années 50, l’intérêt pour l’astrologie se développe ; bien sûr, cette discipline avait déjà connu un début d’essort avant guerre : en France avec des personnalités comme Volguine, Gouchon, Rumélius, Privat entre autres, et en Belgique, notamment avec G.L. Brahy et sa revue « Demain ». En un mot, la librairie fonctionnait bien, les EDITIONS TRADITIONNELLES rayonnaient sur la place, en dispensant des voies d’accès couvrant un large éventail de disciplines, allant de l’enseignement de base des différentes techniques d’éveil à la connaissance de soi, à la diffusion des œuvres majeures des plus importants spécialistes de la spiritualité et de la métaphysique, en particulier pour ce qui est de notre Maison : les écrits de René Guénon, surtout que depuis 1951, ce dernier repose en Egypte dans le grand cimetière du Caire, ce qui ne fait qu’accentuer la valeur inestimable de son œuvre proprement providentielle. Mais, en 1954, le cadet des frères Chacornac disparaît aussi, laissant une veuve, et surtout son frère aîné pour affronter seul la direction du magasin. Paul n’est plus tout jeune, et c’est une lourde charge, d’autant que la partie financière n’a jamais été son fort. La situation se dégrade rapidement et les divers replâtrages mis en œuvre pour tenter de sauver la situation ne font qu’alourdir encore l’affaire qui s’enfonce. En 1957, un homme ayant quelques notions dans la manière de conduire les affaires apprend les difficultés de l’éditeur ; il a fait récemment l’acquisition d’une petite imprimerie dans le quartier et propose son aide à Paul Chacornac ; nul n’assista aux entretiens qui amenèrent ces deux personnages, quasiment de la même génération, à trouver un terrain d’entente, cela n’a d’ailleurs que peu d’importance ici. L’essentiel consiste à retenir qu’en 1958, la Maison du quai Saint - Michel devient la propriété de Monsieur A. André Villain, et que le vieil éditeur voit en contrepartie son passif entièrement réglé,et son avenir protégé, il conservera même l’usage de son bureau tant qu’il voudra venir y travailler. Mr Villain de son côté ne tarde pas à s’entourer de quelque main-d’œuvre, c’est obligatoire car il approche de la soixantaine et se trouve à la tête de trois, sinon quatre affaires encore en activité. Une secrétaire, une vendeuse et un homme pour les paquets lui permettront de partager son temps entre ses autres petites entreprises et la boutique qui devient son quartier général. Chaque fois qu’il le peut, il monte bavarder avec Paul Chacornac, il a tout à apprendre de ce métier nouveau pour lui, et son professeur est ravi, même s’il voit de moins en moins clair, il vibre en racontant l’histoire de ce lieu dans lequel, il est né. Il ne cessera de venir quai St- Michel que lorsque sa santé ne lui permettra plus de sortir de chez lui, A. André villain se rend très vite compte que le catalogue des Editions Traditionnelles doit être remonté, et sa petite imprimerie, rue de la Harpe va s’avérer très utile, ne serait-ce, déjà, que pour continuer l’édition des études traditionnelles sous la bienveillante houlette de Michel Vâlsàn, dont l’immense culture ainsi que sa fidélité à l’œuvre de Guénon, constituent pour A. Villain un soutien des plus précieux. Le nombre des titres qui avait vertigineusement baissé se stabilise bientôt et durant les années 60 commence même à se redresser. En gestionnaire avisé, le nouveau directeur ne veut pas aller trop vite ; le commerce fonctionne correctement et la clientèle côté ésotérisme pur et métaphysique est assurée par tout ce qui tourne autour des études traditionnelles. En 1968, Henri Gouchon, ami de la maison depuis longtemps suggère à A.Villain de relancer une revue d’ Astrologie afin d’équilibrer la ligne éditoriale, la précédente tentative des Chacornac datant de 1938 avec « Astrologie » ayant cessé au huitième numéro, du fait de la guerre. L’affaire est vite réglée, et celui qui allait devenir l’un des, sinon le plus éminent astrologue de langue française du vingtième siècle André Barbault fonde « l’Astrologue », en assumant le poste de Rédacteur en chef. Il s’est entouré des plus brillants de l’époque, Colombet, Santagostini, Berthon, Nicolas, pour ne citer qu’eux, et cette nouvelle revue obtient l’effet escompté, les EDITIONS TRADITIONNELLES tiennent à nouveau le haut du pavé et le service aux écoles d’astro qui fleurissent sera tout à leur honneur durant les deux décennies qui vont suivre.
Ci-dessous vous pouvez découvrir l’entretien sonore que André Braire, responsable avec sa femme Nicole des « Éditions Traditionnelles » à accordé à France Culture en 1997
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